Cyberpresse/La Presse review

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jarkko
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Cyberpresse/La Presse review

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This one comes from Céline:

http://www.cyberpresse.ca/arts/article/ ... 3029.shtml

Les liaisons montréalaises de Leonard Cohen

Nathalie Petrowski

La Presse

Pour son 70e anniversaire, le 21 septembre dernier, Leonard Cohen s'est fait un cadeau: un nouveau disque, qui sortira mardi sous le titre énigmatique de Dear Heather. Il s'est aussi payé le luxe de n'accorder aucune entrevue. Respectueux de son silence, nous sommes néanmoins partis à la recherche de ses traces dans les rues de Montréal. Voyage intérieur au pays de Leonard.

J'ai glissé le CD dans le lecteur de la voiture. Les accords mélancoliques de Go No More A-Roving, première pièce de Dear Heather, le nouveau disque de Leonard Cohen, se sont élevés comme des volutes de fumée. J'ai attendu que sa voix fantomatique morde doucement dans les paroles de Lord Byron pour partir à la recherche de Leonard dans les rues de Montréal, ces rues qu'il a tant arpentées avec son port altier et son célèbre imperméable bleu.

La voiture a pris la direction de Westmount, descendu la rue Belmont avant de s'arrêter devant le balcon jaune de la maison jumelée en briques où Leonard Cohen et sa soeur Esther ont grandi pendant les années 30 et 40. La maison n'était pas aussi grande et cossue que je l'avais imaginée. «C'était une maison ben ordinaire», a confirmé la chanteuse Kate McGarrigle qui, contre toute attente, n'a parlé à Leonard Cohen qu'une fois dans sa vie. «C'était il y a quatre ans à L.A. Ça a duré à peu près deux minutes, mais nos enfants se connaissent et se fréquentent depuis plusieurs années. En fait, celle que je connais le mieux, c'est sa soeur Esther qui vit à Miami. C'est une matante adorable. Un jour, en compagnie du fan numéro un de Cohen, elle m'a fait visiter la maison rue Belmont, inhabitée depuis des années. J'ai vu la chambre de Leonard. C'était assez spécial.»

Spécial? Non pas si spécial que ça, selon Robin Geller qui a racheté la maison en 1996 avec les livres, les raquettes de tennis, les gants de hockey et le mobilier de la chambre de Leonard. «En fait, dit-elle, c'était la chambre typique d'un jeune de cette époque avec la bibliothèque encastrée, le lit, le bureau et la commode. La maison n'était pas grande, c'est vrai, mais il y avait quand même une chambre pour la bonne et une autre pour la nanny, signe que ses habitants n'étaient pas précisément de la classe moyenne.»

L'Université McGill fleurie par l'or des feuilles d'automne est apparue à travers le pare-brise. C'est ici au début des années 50 que Leonard a étudié les lettres anglaises avec A.M. Klein à qui il dédie la chanson To a Teacher et avec Frank Scott dont il reprend les paroles dans Villanelle For Our Time. Les deux hommes sont morts depuis longtemps et ne sauront jamais l'hommage que leur élève leur rend sur Dear Heather.

Ce n'est pas le cas du poète et écrivain Irving Layton, toujours vivant à 92 ans et qui fut son plus grand maître et mentor. La première chanson du disque lui est dédiée. Mais affligé d'Alzheimer et de Parkinson, Layton ne risque pas de l'écouter ni de se souvenir de ce souper il y a 10 ans où il annonça de manière péremptoire à table: « Le problème de Cohen, c'est un narcissique qui se déteste. »

Le professeur de littérature de McGill, Brian Trehearne, lui s'en souvient. « C'était chez moi et Layton avait un peu raison. Cohen est effectivement fasciné par lui-même comme Layton, au demeurant. La différence c'est que la maniaco-dépression de Cohen l'a souvent plongé dans des abîmes de dégoût de soi qu'il a dû combattre âprement. »

Aux yeux du professeur, Layton comme Cohen sont les deux grands libérateurs de la littérature canadienne-anglaise. « Le thème de la sexualité était très présent chez les deux, dit-il. Mais Layton était un macho de la vieille génération alors que Cohen a une approche plus ludique et hédoniste à l'égard de la sexualité. Et puis Layton était en amour avec sa célébrité alors que Cohen s'en est toujours méfié, déchiré qu'il était entre l'homme authentique qu'il voulait être et la figure publique qu'il est devenu. »

La voiture a bifurqué vers le bas de la ville, rue Notre-Dame en direction de l'édifice qui abritait le studio DMS là où a été enregistré en 1987 le magnifique disque I'm Your Man avec plusieurs musiciens québécois.

Pour le guitariste Michel Robidoux, cet enregistrement fut un cadeau du ciel. « Quand Leonard Cohen décide qu'il te fait confiance, il s'abandonne complètement. Il est généreux de son temps, te laisse entrer dans sa vie sans cérémonie. Je me souviendrai toujours du jour où il est arrivé pour enregistrer sa voix. Les arrangements étaient terminés. Il ne restait plus personne dans le studio sauf l'ingénieur. Je lui ai dit: tu ne peux pas rester tout seul comme ça! Est-ce que ça te dérange si je reste? Cohen m'a regardé avec un air étonné et reconnaissant. » Y'a jamais un seul musicien qui m'a proposé ça. J'apprécie énormément. Oui s'il te plaît, reste. « On a sorti la bouteille de scotch et après cela pendant des années, peu importe où il était dans le monde, Cohen m'envoyait une boîte de dattes à Noël. »

La voiture quitte Notre-Dame et se dirige maintenant vers le Vieux-Montréal sur l'air de Dear Heather, énigmatique chanson d'un seul couplet où Leonard implore la mystérieuse Heather de marcher devant lui avec un verre à la main et ses jambes toutes blanches de l'hiver. Me voilà rendue à l'angle des rues Saint-Paul et Saint-Jean Baptiste, devant cet ancien temple des nuits magiques de Montréal que Leonard hantait à la fin des années 70. Mais les nuits magiques se sont évaporées, laissant en gage un restaurant mexicain avec mariachis les samedis et plus la moindre trace de Leonard.

Ses filiations névrosées

Lentement, je remonte le long fleuve gris du boulevard Saint-Laurent comme si je remontais les 70 années qui ont mené Leonard Cohen de la rue Belmont en passant par Hydra, Paris, New York, Los Angeles et la montagne pelée du mont Baldy, où il a vécu en moine pendant cinq ans jusqu'à aujourd'hui à Montréal, une ville qu'il a quittée mille fois mais où il est toujours, toujours revenu, renouer avec ses neurotic affiliations, ses filiations névrosées, comme il l'a si joliment dit un million de fois.

Le parc du Portugal, rue Vallières, resplendit d'un soleil froid mais lumineux. Au milieu de la place, dans le gazebo que Leonard a dessiné tant de fois de sa fenêtre, un jongleur répète inlassablement sa routine. J'attends en grelottant que Leonard surgisse de la vieille maison en pierres beige et m'envoie la main. Mais les rideaux sont tirés et la porte résolument fermée.

« Je pense qu'il a travaillé très tard la nuit dernière. Quand je suis arrivé ici à 5 h du matin, la lumière était encore allumée chez lui », me raconte Steve Zimmerman, un homme aussi rond qu'il est accueillant, proprio avec Deborah Richards du resto-café Bagel etc. dont Cohen est un habitué.

Steve me dit que si je suis patiente, Leonard finira bien par apparaître et par commander un café au comptoir de granite à côté de la petite plaque en or de Hazel Field, la photographe, amie et voisine qui ramasse son courrier quand il est en exil quelque part dans le monde.

« Il est en ville depuis au moins deux mois, m'assure Steve. Et il vient pratiquement ici tous les jours. Il prend son temps, boit un café, jase de tout et de rien. C'est vraiment quelqu'un de charmant et de drôle. Pour ses 70 ans, il s'est laissé pousser une barbichette. Ses cheveux sont tout blancs mais il n'aime pas trop ça vieillir. L'image qu'il veut qu'on garde de lui, c'est celle-là », dit-il en me tendant le CD The Essential Leonard Cohen où le chanteur apparaît dans toute la splendeur de ses 30 ans.

Trente ans, c'est à peu près l'âge que Cohen avait lorsqu'il a donné rendez-vous au Bistro de la rue de la Montagne à Lewis Furey qui, à l'époque, s'appelait encore Lewis Greenblatt et ignorait qu'il deviendrait metteur en scène et scellerait sa vie à celle de Carole Laure.

« Je suis resté assis en face de lui 45 minutes, le temps qu'il lise lentement chacun de mes poèmes. J'avais 16 ans et j'étais complètement subjugué par cet homme, qui était déjà un mythe et qui avait accepté de me rencontrer aussi simplement. Il a été d'une grande générosité et m'a encouragé à continuer. Pour moi, il a non seulement été la première voix poétique montréalaise mais un formidable pédagogue. »

Le Félix des anglos

La première rencontre entre le journaliste Juan Rodriguez et Cohen s'est déroulée, à quelques détails près, exactement de la même manière. Rue de la Montagne. Dans un appartement où Cohen a lu les poèmes du jeune étudiant qui, quelques années plus tard, allait lui servir la première d'une longue suite de critiques virulentes. « Il a toujours été très encourageant. Sauf la fois où il m'a appelé d'un bar en m'ordonnant de me ramener tout de suite pour mettre les choses au clair. Il ne parlait pas fort, mais il était fâché. C'était je crois surtout à cause de sa mère que mes critiques inquiétaient. »

Il n'en demeure pas moins que pour Rodriguez comme pour Lewis Furey et tant d'autres, le Cohen des années 60 était un héros et le premier grand espoir blanc du Montréal anglophone.

« C'était notre Félix Leclerc à nous, dit Rodriguez, la seule entité culturelle hip, moderne et anglophone à sortir d'une ville où tout ce qui était vibrant, excitant et intéressant venait de l'univers francophone. »

Quarante ans plus tard, le héros a vieilli mais pas tant que ça finalement. Il continue à écrire jusque tard dans la nuit et à sortir des disques qui se vendent encore mieux qu'avant. Il n'a pas renoncé à la maison de la rue Vallières ni au boulevard Saint-Laurent même s'il ne l'arpente plus avec son célèbre imperméable bleu que la célébrité lui a volée. Il n'y a peut-être plus de Suzanne dans sa vie, mais il a ses deux enfants, Adam et Lorca, jamais très loin de lui. Il y a aussi cette ravissante femme couleur café au lait au bras de laquelle il a été aperçu avenue du parc la semaine dernière. Et puis, il y a Montréal, la ville de ses névroses et de ses illuminations. Montréal, où il revient de plus en plus souvent, mesurer le temps qui passe et renouer avec la partie la plus profonde et la plus secrète en lui.



Text under the photo by Lorca: Quarante ans plus tard, le héros a vieilli mais pas tant que ça finalement. Leonard Cohen continue à écrire jusque tard dans la nuit et à sortir des disques qui se vendent encore mieux qu'avant.
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lizzytysh
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Post by lizzytysh »

And just when Linmag's gone on vacation :( .
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